Coupe des 2 Phares 2013

(31juillet-2aout)

Camaret-La Rochelle.

 

Livre de bord de Mao Titoï III.

 

Ce vendredi 2 août, il est environ 1h00 du matin, à la bouée « Yeu Cables ». Milig Hélias, notre président du Comité de course, veille à bord de Chrys’Fan pour noter le temps de passage des concurrents. Après de longues heures d’attente, Marguerite, suivi de près par Mao Titoï III et Khayyam, franchit la « porte ». Mao Titoï III est potentiel vainqueur, mais il reste les quelques 60 milles jusqu’à la bouée des Minimes.

Tout a commencé quelques 41 heures auparavant à la Pointe du Grand Grouin en baie de Camaret. Le départ, prévu la veille à 18h00, fut judicieusement retardé en raison de la météo plutôt défavorable qui sévissait sur la Rade de Brest depuis 48 heures.

C’est par un vent de Sud, dans une brume évanescente et sous les nuages que les 12 concurrents s’élancent vers la Pointe du Toulinguet.

Les premiers choix tactiques se révèlent : sous le vent de la côte pour MTT, Rose Noire et Rouvelon. Marguerite passe la ligne en premier (par 2 fois !) au près du bateau comité s’octroyant les points du trophée Langlois.

MTT vire rapidement la Pointe du Toulinguet et s’engage dans l’anse de Pen Hat, suivi par Khayyam, son grand frère en conception.

Le vent modéré de Sud (180-200°) et le petit coefficient de marée n’invite pas à s’engager dans les Tas de Pois à l’instar d’Orana, et à longer la côte vers le Cap de la Chèvre. Malgré la houle résiduelle, MTT pointe vers la Basse du Lys.

Lionnel analyse les nuages et la pluie intermittente. Le choix de faire route vers le Cap Sizun, passée la Basse du Lys, est dicté tant par la théorie que par le sens pratique. Le vent tourne légèrement SSW favorisant le cap.

 

Aux environs de mi-journée, MTT vient une nouvelle fois se positionner sous le vent de la côte pour bénéficier des surventes et de l'influence de la Pointe du Raz sur la direction du vent. La trajectoire n'est pas aussi directe, le vent adonnant ou refusant au gré des variations de la côte.

 

 

 

Le Raz de Sein est franchi vers 13h00-13h30. Khayaam félicite son petit frère. A bord, on se réjouit d'avoir tenu tête à Marguerite, mais c'est le « diable » (Orana) qui mène la course !

 

Pour la longue Baie d’Audierne, où la grisaille cède à un ciel bien ensoleillé, la voie est toute tracée : dans l'axe du courant principal, cap au 135° avec un vent de Sud. Mais voilà, petit à petit, Éole se joue de la flotte et tourne au SSE.

 

A bord de MTT, on s'interroge pour une route plus recentrée mais le futur cap nous renvoie sur Marguerite que nous continuons de devancer. Le principe d'aborder la Pointe de Penmarc'h comme précédemment la Pointe du raz, c'est-à-dire sous le vent de la côte, s'impose rapidement car la direction du vent va nécessairement se modifier et favoriser notre progression.

 

A 17h45, nous franchissons la Pointe de Penmac'h, le courant portant à l'ouest, un contre bord de recentrage vers la bouée Cap Caval s'impose. Il sera de courte durée, le vent basculant, de nouveau, au SSE.

 

Vers 18h15, nous faisons cap au131°.

 

A 19h52, le vent est à nouveau au 200°. Nous devançons (avec plaisir) Orana qui tente d'accélérer en envoyant son gennaker mais y renonce assez rapidement.

A la vacation de sécurité de 21h00, Orana se situe quelques 200m derrière nous. Khayyam et Marguerite se situent légèrement plus Est et plus Nord.

Nous formons ainsi un groupe de tête tandis que Kraken 2, Cyrène, Men Brial et Danycan se situent une dizaine de milles derrière nous et que Rose Noire, Rouvelon et Thalamus sont en position intermédiaire. La position d'Eloise 2 n'a pas été relevée .

 

Agacé par la présence ,sur notre arrière, d'Orana, et compte-tenu des prévisions météo, MTT prend la décision de plonger au Sud sous spi par vent de travers.

La nuit s'annonce belle. Le premier quartier de lune se lève au NNW environné d'étoiles.

Mais voilà, la nuit sera longue : comme prévu le vent tombe et disparaît pour un long moment.

Les quarts se succèdent et nous sommes impatients de voir le vent revenir par l'ouest !

 

A la vacation de 9h00, Marguerite se situe devant nous un peu plus au sud. Nous renonçons à capter les positions des autres concurrents. En 8 heures, nous n'avons progressé que d'à peine une douzaine de milles mais, maigre consolation, nos concurrents ont subis le même sort.

Entre 11h00 et 18h00, nous faisons quasi route directe vers l'Île d'Yeu, poussés par un petit vent de NW. Khayyam nous remonte progressivement tandis que Marguerite et Orana se lancent dans une lutte mano a mano au largue et plongent vers le sud !

 

Une cinquantaine de milles sont ainsi couverts avant que nous apercevions les contours de Yeu.

En fin de journée, vers 21h00, nous sommes à proximité des Chiens, en compagnie de Khayyam. Marguerite, qui a lâché Orana, revient vers nous. Au compas de relèvement nous sommes très légèrement devant.

Et, de nouveau, le vent mollit à la tombée du jour. Le trio que nous formons progresse très lentement, Khayyam un peu à distance de la côte, Marguerite au plus près et MTT en position intermédiaire, chacun pouvant à loisir observer son adversaire. Il nous faudra près de 4heures pour parcourir les 6 à 7 milles qui nous séparent de la « porte » (Yeu Cables).

A la hauteur de Port Joinville, nous perdons de vue Marguerite et pensons l'avoir laissé sur place, à la suite d'une manœuvre (audacieuse ?) en masquant la grand voile dans l'axe du bateau, ce qui permit au spi de porter mieux ( mais il s'agissait sans doute une risée favorable). Les lumières de la côte nous empêcherons toute identification de sa position réelle, tandis que nous pouvions observer la lente progression du yacht présidentiel.

Alors que nous avons débordé la Pointe du Corbeau, nous constatons le feu bâbord d'un voilier sous spi ! Serait-ce le « diable » revenu de Vauvert par le sud de l'Île ? Ouf ! C'est Marguerite qui annonce, avec un peu d'avance son passage de la porte . Milig, qui veille à bord de Chrys'Fan ( et qui n'est pas là pour contempler les étoiles) rectifie. Quelques minutes plus tard, notre trio franchit la porte et poursuit sa route vers La Rochelle.

A bord de MTT, nous sommes ravis de cette position qui fait de nous un vainqueur potentiel. Reste à parcourir la soixantaine de milles qui nous séparent de la ligne d'arrivée. Avant de me coucher, il me faut choisir la marche à suivre. En première intention, la route directe au 140°-145° me paraît la plus légitime permettant même de choisir entre le Breton et l'Antioche en fonction du vent et de la progression. Oui, mais Marguerite et Khayyam s'engagent dans une route plus Est. Il ne nous reste que le choix de marquer au plus près nos adversaires en essayant de ne pas perdre de vue leurs feux de position. Il est alors 1h30 environ !

A 2h50 , David note notre position avant de terminer son quart. Le vent est établi NW 4-5, et il est temps d'empanner comme nos concurrents.

C'est l'instant fatal : l'empannage s'avère « rock'en roll », le spi s'enroule autour de l'étai ne laissant d'autre choix que de l'affaler.

La nuit profonde, le vent et la fatigue cumulée depuis presque 48 heures nous fait renoncer à son renvoi immédiat et à une victoire potentielle mais incertaine face à de redoutables concurrents. Quoiqu'il en soit nous sommes satisfaits d'en être arrivé là.

Le choix de la route se fait simplement : cap au sud pour passer un peu au large des Sables d'Olonne et embouquer plus tard le Pertuis Breton.

Avec l'aube et le vent qui se stabilise alors au 320° force 2-3, le spi est renvoyé vers 5h30.

A 6 heures, Gérard se renseigne au téléphone de notre position. Il peut envisager sans hâte la mise en place de la ligne d'arrivée.

David qui reprend son quart, s'attache à préparer un petit déjeuner à l'anglaise bien venu.

Il est environ 9h30, nous nous situons dans l'alignement entre le Phare des Baleines et la Pointe du Grouin du Cou ; A la jumelle nous apercevons Orana, à proximité de cette dernière et Marguerite à la hauteur de L’Aiguillon sur mer . Khayyam, lui, n'est pas aperçu. Peut-être fait-il route par le Pertuis d'Antioche ?

Nous rentrons en contact avec Orana et rassurons, par là même Nicolas et son équipage sur notre position qu'il ignorait.

La fin de cette Coupe des 2 Phares est sans surprise pour nous. Reste à savoir qui de Marguerite ou d'Orana l'emportera au final en temps compensé : 52 heures de course environ et des rating très proches !

 

 

Ce récit, reconstitué à partir des données du livre de bord, est dédié à David et Lionnel qui ont su conjuguer leurs qualités respectives pour permettre à MTT de se distinguer dans cette C2P 2013.

 

Petits détails ( qui nous ont obligé à tenir le journal de bord au mieux) :

MTT a navigué :

  • sans anémomètre, ni girouette fiable,

  • avec un lock capricieux et intermittent,

  • sans son GPS portable (avec cartographie intégrée).

 

 

Remerciements très sincères à

  • Milig Helias, Président du Comité de Course, pour ses choix judicieux,

  • Chrys'Fan et son équipage,

  • Olivier, pour son organisation.

 

Sincères félicitations à tous les concurrents et plus particulièrement à :

  • Marguerite et son équipage aussi motivé que sympathique,

  • Khayyam et son équipage restreint,

  • Orana,

pour nous avoir permis une course aussi intéressante et passionnante jusqu'au bout.